Quand Madame de Scudéry faisait visiter les jardins du Roy !
"Nous fûmes dans le jardin de fleurs à balustrade dorée, bordé de cyprès et d’arbustes différents, et rempli de mille espèces de fleurs ; la face d’en bas est fermée par une balustrade à hauteur d’appui, d’où la vue est fort champêtre. Ce jardin, aussi bien que tous les autres, a ses terrasses bordées de vases de cuivre peints en porcelaine. Au-dessous de cette terrasses à balustrade est le jardin des orangers, dont la belle Etrangère fut extrêmement surprise ; car elle ne comprenait pas qu’on pût mettre de si grands arbres dans des caisses. Telamon qui a extrêmement voyagé, avoua n’en avoir jamais vu de si beaux, et ne loua pas moins les myrthes, dont l’ancienneté les rend admirables..."
"Nous fûmes alors voir tous ces beaux orangers de plus près, que la belle Etrangère admira encore davantage. On lui fit voir ensuite ces grands jardins pour les fruits, où les espaliers de hauteurs différentes disposés en allées, et exposés judicieusement au soleil, on a trouvé l’art d’avoir des fruits qu’on croirait que le soleil de Provence aurait fait mûrir. Nous fûmes au sortir du jardin des orangers voir en passant le labyrinthe, et entre des bois verts entrecoupés d’allées et de fontaines, gagner le haut de ce superbe jardin, qu’on appelle le fer à cheval à cause de sa figure, et dont la magnificence toute royale montre assez qu’il ne peut être à un particulier, quelque grand qu’il fût. La terrasse qui règne au-dessus est un endroit admirable pour la vue, rien de trop loin, rien de trop près ; elle est bordée d’arbustes sauvages toujours verts. Et ce grand jardin en amphithéâtre avec trois perrons magnifiques, et trois rondeaux situés en triangle, a quelque chose de surprenant qu’on ne peut décrire. Tout y rit, tout y plaît, tout y porte la joie, et marque la grandeur du Maître."
Où l'on découvre d'étranges bêtes sauvages !